D
epuis sa naissance, Uqsuralik arpente les contrées arctiques. Chasseuse, elle subvenait aux besoins des siens ; chamane, elle parlait aux vents glacés, à la terre enneigée ou aux eaux gelées pour protéger son peuple ; et en tant que femme, elle perpétuait la vie. Une fois son destin achevé, transformée en pierre, elle veille désormais sur les vastes étendues glacées du Grand Nord.
S’il était donné de s’interroger sur la pertinence d’adapter un roman en bande dessinée, De pierre et d’os pourrait être une forme de réponse !
Le récit éponyme de Bérangère Cournut, imprégné de l'indicible résilience d’Uqsuralik où les paysages exaltent les sens comme les humeurs chamaniques, est un piège en matière d’adaptation dessinée. Pour l’heure, Jean-Paul Krassinsky évite ce dernier. Il a d'abord transformé le long chant d’Uqsuralik en récit mi-narratif, mi-récitatif, donnant ainsi son propre rythme à l'album. Ensuite, il a choisi de ne pas inclure certains passages importants qui auraient pu alourdir ou déséquilibrer son travail. Ses choix s’avèrent opportuns, même s'ils en amoindrissent quelque peu la charge émotionnelle. Mais surtout, il a su transposer l'atmosphère unique émanant du récit de Bérangère Cournut ; ce faisant les pages noircies de mots laissent place à des pages joliment colorées d’autant plus évocatrices. Ainsi, au-delà d'un scénario fidèle à l'œuvre originale, la partition graphique Jean-Paul Krassinsky transcende l'harmonie entre ce pays inhospitalier et ses habitants ; tout comme le réalisme de ses scènes de la vie quotidienne lui conserve toute sa dimension ethnographique. L’essence du roman s’en trouve ainsi préservée, mais exprimée différemment et parfois, sur les paysages, plus fortement !
Une fois n’est pas coutume pour ce type d’exercice qu’est l’adaptation, les cases aquarellées de Jean-Paul Krassinsky complètent le travail d’écriture de Bérangère Cournut avec une telle justesse (pour ne pas dire évidence) qu’il est difficile d’imaginer qu’il puisse en être autrement.
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