"Même les enfants ont le droit de rire de la mort." C'est par cette manchette aguicheuse et parodiant les slogans commerciaux que démarre les nouvelles aventures de La petite boutique des erreurs. La Petite mort vit mal sa célébrité dans un monde où cette dernière est omniprésente et survalorisée sur les réseaux sociaux. Lorsque Pascal Amateur, le présentateur vedette de la chaîne d'infos Fakenews, lui propose une interview, elle ne se doute pas que sa non-existence va prendre un tournant infernal.
Après Les héros meurent aussi, l'auteur opte à nouveau pour un album qui s'intercale dans la série principale. Les lecteurs retrouveront avec plaisir l'univers au ton si particulier, mêlant un humour potache à base de caca et des moments tendres et subtils. Néanmoins, plutôt que de proposer un énième spin-off, Davy Mourier profite de sa notoriété pour questionner et se moquer d'un fait devenu trop présent dans la pop-culture : le fan service. Celui-ci consiste à alimenter la passion des suiveurs et leurs fantasmes avec des contenus digressifs ou superflus qui leur sont spécialement destinés. L'auteur étant un pilier du monde des vidéastes, ayant commencé bien avant l'arrivée de YouTube, il en connaît les codes et les us et coutumes. Son expérience lui fait porter un regard à tout le moins critique. Les planches comportent régulièrement des cases où il assure la promotion de boissons qui sponsorisent les vidéos de son émission Bad News, mais en le faisant à la manière d'un mauvais runing gag pour mieux s'en moquer. Idem pour le merchandising et les autres produits dérivés qui ont inondé la culture otaku. Dans les chapitres dédiés aux Power Rongeurs, il tacle non seulement une marque très connue de figurines, ainsi que les actions qui visent à inonder le marché pour accumuler des rentrées financières records.
Davy Mourier aborde également un autre thème, celui du mal-être. Le personnage principal cherche un sens à son "non-existence". La sorte de "Et si..." qui en résulte conduit à la construction originale de la bande dessinée qui peut se lire dans les deux sens. Le Grand-tout va aider la Petite mort dans son questionnement existentiel en lui faisant vivre un chapitre plutôt classique, voire convenu, qui reprend ce que les fans apprécient. En jouant ainsi avec l'objet livre et avec les envies du lectorat, l'auteur prend un risque qui paie. Enfin, il traite également des conséquences morales du harcèlement en ligne et du rôle des réseaux sociaux et de certaines chaines dites d'informations.
Graphiquement, le trait épais qui a fait le style du dessinateur ne change pas. Les personnalités réelles sont malgré tout reconnaissables. Le découpage oscille entre classicisme et insertions de pages de fausses publicités en fonction des évènements ayant eu lieu dans les chapitres.
Ce nouvel opus de La petite mort est à nouveau une réussite. Davy Mourirer y place des critiques "sociales" et projette certaines de ses angoisses, tout en conservant son humour et une bonne dose d'autodérision.








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