L
e Déviant. C’est le nom de ce serial killer qui a sévi il y a cinquante ans à Milwaukee. Deux adolescents massacrés et enroulés dans des guirlandes de Noël. Depuis lors, Randall Olsen croupit derrière les barreaux. Mais celui qui est devenu un vieil homme fatigué continue de clamer son innocence. Passionné par cette histoire, Michael Schmitz, scénariste de comics, y voit le terreau pour son prochain bouquin. Jusqu'à ce que l'histoire se répète…
Un slasher gore à souhait mettant en scène la figure, un peu cliché, d'un Père Noël meurtrier : les couvertures des deux tomes du Déviant annoncent la couleur et ne trompent pas sur la marchandise. Car c'est bien ce que propose ce polar extrêmement prenant et bien mené. Les évènements s'enchaînent et mettent à mal l'ensemble des personnages, avec des rebondissements savamment dosés. Le trait de Joshua Hikson concourt parfaitement à immerger le lecteur, avec un soin particulier accordé à l'expression des protagoniste – chez qui une forme d'angoisse monte progressivement –, des couleurs appliquées qui imposent une ambiance et plusieurs scènes glaçantes. Mais résumer cette mini-série à cela serait extrêmement réducteur.
Il est de notoriété publique que James Tynion IV est particulièrement vigilant à la représentation des minorités sexuelles et de genre dans ses œuvres. Celles-ci y trouvent systématiquement une place, et il peut s'agir d'un personnage secondaire, sans pour autant que la question de la défense des personnes LGBT ne soit un élément à part entière de l'histoire. Dans le cas présent, c'est, au contraire, au cœur de l'intrigue. Car l'homosexualité de celui qui a été surnommé Le Déviant par la presse locale a pesé lourd dans sa condamnation. Autre époque, autres mœurs ? Pas tout à fait. Cinq décennies plus tard, les mentalités ont visiblement encore peu évolué et les mêmes travers ressurgissent lorsque de nouveaux crimes sont commis.
Le personnage de Michael est indéniablement le plus intéressant à suivre : complexe, tourmenté et jamais caricatural. Son passé est exploré, sa psychologie mise à nue par le scénariste. Sans aller jusqu'à parler de dimension autobiographique, il est, d'ailleurs, permis de s'interroger sur la part d'éléments tirés de son propre vécu par l'auteur de The nice house on the lake. Introduit à la fin du premier opus, l'agent fédéral Hall apporte aussi un souffle intéressant au récit en incarnant une forme d'anti-manichéisme absolu. Au bout du compte, le bédéphile en a pris pour sa dose de frissons et d'action tout en étant abandonné avec des réflexions profondes sur la tolérance et le rapport à l'autre.
Avec ce deuxième tome, James Tynion IV et Joshua Hikson concluent leur Conte de Noël avec brio. En usant d'une petite ficelle pour résoudre l'intrigue principale, certes. Mais l'essentiel est ailleurs.









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