N
ées en 1977 au sein du Trombone Illustré, le supplément «pirate» à Spirou imaginé par Yvan Delporte, Les Idées Noires fut pour son auteur une sorte d’aboutissement artistique et une forme de libération thématique. Génie reconnu par tous, André Franquin avait lâché Spirou depuis quelques années et avait amené son Gaston à des sommets. L’âge venant et une santé capricieuse l’avaient aussi forcé à réduire sa cadence de travail. Il s’investit néanmoins totalement dans l’aventure du Trombone : illustrations phénoménales, gags divers explorant des sujets habituellement mal vus chez Dupuis et cette nouvelle approche extraordinaire gravée dans le papier à l’aide d’un stylo Rotring©. Armé de cet outil innovant (merci Frédéric Jannin), il va débuter une série de planches visuellement incroyables. Une fois la parenthèse Trombone refermée, il continuera cette exploration dans le Fluide Glacial de Gotlib. Il en résultera finalement un tome et demi de folie graphique jamais égalée.
Accompagnant l’exposition présentée à l’occasion du Festival Quai des Bulles 2025, Les idées noires – Les origines rassemble une foule de documents rares (planches originales, croquis, correspondances, etc.) entourant cet épisode majeur de la carrière du créateur de Gaston Lagaffe. L’ouvrage est introduit par sa fille, Isabelle, qui précise l’état d’esprit de son père à cette époque. Ensuite, les différentes pièces se succèdent et permettent de mieux comprendre le cheminement de l’artiste dans la réalisation de cette œuvre emblématique. Des extraits d’entretiens (merci éternel à Numa Sadoul) jouent le rôle d’appareil critique au fil des pages.
D’un côté, il est impossible de ne pas être touché par ces planches, dont beaucoup sont devenues iconiques par la suite. Les quelques rappels de l’origine de certaines histoires se montrent également très intéressantes à découvrir (les drames écologiques du début des années septante, par exemple). D’un autre côté, la partie analytique s’avère très pauvre et, sauf pour les bons mots de Luce Degotte (qui a fourni quelques scénarios), les fans n’apprendront pas grand-chose de nouveau.
Catalogue d’expo sensu-stricto, il manque aux Idées noires – Les origines un véritable cahier critique afin d’être totalement satisfaisant. Pour un aperçu plus complet, il est conseillé aux amateurs de plutôt de se tourner vers Il était une fois les Idées Noires et à Et Franquin créa la Gaffe.








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