
vu hier sur amazon prime
Le mari d'Harper vient de se suicider. our se reconstruire, la jeune femme decide de passer quelques jours dans une maison perdue au Coeur de la campagne anglaise. Son programme comporte un peu de travail, de longues promenades et beaucoup de solitude. Pourtant, tout se met à dérailler lorsque des hommes commencent à la tourmenter.
Men est un film extrêmement étrange et fascinant, qui souffre sans doute d'une construction très complexe et d'une charge symbolique très forte. Souvent mal compris, ce film est souvent accuse d'être une charge contre les hommes. Au vu du casting masculine
(à l'exception d'un personnage, exclusivement constitué de Rory Kinnear dans une multitude de rôles)
, on peut en effet en conclure que Men est une réponse acerbe à #Notallmen.
Le récit multiplie les micro-aggressions envers son héroïne, l'excellente Jessie Buckley, faisant lentement monter un sentiment de malaise parfaitement contrebalancé par le travail incroyable de Rob Hardy sur les couleurs et les scènes bucoliques. La première partie fonctionne remarquablement bien. Le passage d'Harper dans un tunnel est par exemple particulièrement réussi. Ensuite, le scénario emprunte de plus en plus aux mythes anciens (une imagerie païenne ainsi qu'une entité étyrange qui serait "the green man", divinité liée aux saisons et à la renaissance) pour culminer avec un dernier acte dans lequel Alex Garland lâche les chevaux. Le body horror grotesque au possible pourrait laisser penser que le film s'effondre comme un chateau de carte. En fait, à condition de comprendre les intentions de l'auteur, il s'avère que cette dernière demi-heure répond à une vraie logique. Si elle n'est pas parfaitement maitrisée, elle fait pourtant preuve d'une intelligence et d'un engagement cinématographique assumé, jusqu'à une dernière image (en deux temps) qui laisse au spectateur l'opportunité de réfléchir à ce qu'il vient de voir. Tout est sous nos yuex, mais il faut prendre le temps de réfléchir et de déméler l'écheveau d'une narration qui multiplie les symboles
(chaque "homme" présente un archétype patriarcal: le prêtre-autorité morale, le policier-protecteur, le propriétaire-qui assure les besoins physique, l'enfant dénaturé...)
, les correspondances, les non-dits. Peut-être le film est-il trop ambitieux et perd en fluidité. La multiplication des symboles et le mélange des genres joue parfois en sa défaveur.
Alors, oui, le film prend partie pour son héroïne et dénonce la toxicité masculine. Je pense qu'il s'addresse pourtant paradoxalement à un public masculin, pour le forcer à adopter un autre point de vue. Il ne se perd pas dans des explications fumeuses, se concluant sur une réplique ambigue, mais la fin ne laisse pourtant aucun doute. Il compte sur l'intelligence du spectateur, qui peut soit prendre le point de vue de Harper, soit celui des autres. Mais l'un des deux choix n'est finalement qu'un mirage. Et lorsqu'on sort d'un film continue de tourner dans sa tête après le visionnage, révélant d'autres éléments qui nous avaient échappés sur le coup, c'est qu'il est plutôt très bon.